Faisant suite aux précédents articles sur les associations et communes qui s’investissent dans le sauvetage et l’entretien de leur patrimoine historique, nous vous proposons une visite de la chapelle de la Ducraie sur la commune du Buret.
Cet édifice qui est la propriété de la commune est resté fermé au public pendant plusieurs années étant donné son état de dégradation. Devant l’alternative, démolition ou restauration, c’est cette dernière qui a été choisie. Une convention a été passée en 2016 avec la Fondation du patrimoine et les résultats de la souscription dépassant les prévisions, toutes les tranches de travaux englobant la charpente, la couverture, la maçonnerie et la peinture intérieure ont été réalisées entre 2018 et 2021.
Histoire.
L’histoire de cet édifice commence d’une façon qui nous est familière. Le terrain sur lequel elle a été construite s’appelle la pièce de la Bonne-Vierge. En effet, dans un chêne têtard, une émousse, il y avait depuis une époque inconnue une statuette de la Vierge. Le chanoine Couanier de Launay qui a publiés ses recherches vers 1879, parle de faits remontant à 60 ans.
A défaut de documents plus précis, il est probable que cette vénération soit contemporaine de celle de Notre-Dame des Freux à L’Enfènerie (Bouère). On ne peut ignorer le fait que le chêne était un arbre sacré pour de nombreux peuples dont les Celtes. La christianisation des lieux païens tels que fontaines, pierres levées ou arbres s’est faite selon deux méthodes : la destruction ou l’assimilation. Comme les croix placées en haut des pierres levées ou gravées sur une face, le dépôt de statuettes de la Vierge dans les arbres relève probablement de la même pratique. On retrouve ces traditions et légendes Aux Freux, au chêne de la Chauvière (La Rouaudière), à la Crue (Saint-Martin-du-Limet), à la Tremblaye (Daon) et bien d’autres.
Au début du 19e siècle, naquit à Saint-Charles-la-Forêt un certain Pierre Bodinier. Cet enfant était paralysé de naissance ; bras et jambe gauche ne pouvaient bouger. Alors qu’il avait 7 ans, lassée d’entendre les médecins avouer leur impuissance à le guérir, sa mère le porta jusqu’à la Bonne-Vierge. L’enfant guérit. C’est le premier témoignage de guérison constatée.
En 1860, le curé du Buret, Louis Piau, découvrant la statuette cassée alors que le lieu était toujours très fréquenté, la fit réparer et embellir l’environnement du chêne. Cela eut pour conséquences d’augmenter le nombre de pèlerins. Enfin en 1866, devant le nombre de demandes, l’autorité diocésaine accorda l’autorisation de faire élever un sanctuaire.
Ici se place un épisode récurent pour l’implantation de croix ou d’oratoires ; le propriétaire du champ ne veut ni vendre ni donner son champ aux représentant du clergé. La parcelle est finalement achetée par un particulier qui en fait don à la Fabrique du Buret.
Construite grâce aux dons des fidèles, les charrois de matériaux réalisés gratuitement par les fermiers des environs, la chapelle s’élève en trois ans et elle est bénite le 21 novembre 1874 par le doyen de Grez-en-Bouère. Elle est dédiée à Notre-Dame Auxiliatrice.
Architecture et mobilier.
C’est un édifice néo-roman dont l’orientation est inversée, le chœur à l’ouest. Il est édifié en moellons enduits avec contreforts, corniche, rampants, encadrements d’ouvertures et niche en calcaire marbrier de Bouère. La niche est occupée par une représentation de Vierge à l’Enfant. Le clocheton-mur, surmonté d’une croix pattée, abrite une cloche non datée fondue par les établissements Bollée du Mans.
Le chœur est éclairé par trois baies dont deux portent encore les vitraux qui auraient été offerts par l’abbé Angot lorsqu’il était curé du Buret de 1882 à 1885. Le vitrail axial a disparu. Celui au sud représente Le Saint-Esprit descendant sur la Vierge et les apôtres à la Pentecôte, avec mention « SEPT : DONS : DU : ST : ESPRIT » et l’Assomption de la Vierge avec mention « BONNE : MORT ». Celui au nord représente la Résurrection, « CONVERSION : DU : CŒUR » et Jésus apparaissant à la Vierge et aux apôtres « DÉSIR : DU : CIEL ».
L’autel de pierre blanche est décoré de sculptures en haut-relief. On peut y voir de part et d’autre, Ste Anne enseignant la lecture à la Vierge et l’Annonciation. Sur le devant d’autel, figure la légende du pèlerinage ; le chêne avec la statuette de la Vierge est entouré de personnages appartenant à différents milieux sociaux mais surtout des mères amenant leurs enfants. Un des homme, blessé au bras, porte un uniforme du Second Empire. Sur le dessus de l’autel est déposée traditionnellement une petite chapelle en bois ornée de cabochons, censée contenir la figurine qui était initialement dans le chêne.
Indépendamment du pèlerinage du 15 août qui se déroulait tous les deux ans, le lieu attirait des pèlerins qui, venus présenter des enfants, laissaient en ex-voto les pièces de vêtements accrochées sur des cadres placés sur les murs de la nef. Des ex-voto à la mémoire de soldats morts pour la France complètent le décor.
Il reste maintenant à remettre le mobilier en place. Dès que les conditions sanitaires le permettront, monsieur Didier Catillon, maire du Buret, pourra procéder à son inauguration avec la satisfaction d’avoir participé au sauvetage d’un élément représentatif du patrimoine et de l’histoire du département.