Excursion du 20 octobre 2019

– Compte rendu de l’excursion du 20 octobre 2019 –

 

Le dimanche 20 octobre 2019, dès 10 heures, 25 personnes ont découvert le patrimoine de la Vallée de la Vègre.

Nous sommes accueillis par Madame de Bouillé, propriétaire du manoir du Logis. Ce dernier surplombe le village de Fontenay-sur-Vègre. C’est est un petit bijou d’architecture que nous conte la propriétaire. À la fin du XIIe siècle, l’endroit est stratégique ; un château est bâti sur un éperon rocheux qui surplombe la vallée de la Vègre.

Asnières sur Vègre DSCN1682Le logis actuel présente des architectures qui s’échelonnent entre le XIIIe et le XVe siècle. Il comprend plusieurs corps de bâtiments qui forment trois côtés d’un quadrilatère. Le bâtiment principal, face au sud, est flanqué aux pignons Est et Ouest de deux petits pavillons carrés, percés d’embrasures de tir permettant de défendre l’accès à la cour intérieure. Attenante au pigeonnier, une cave voûtée, la plus grande du département, relie les deux corps de bâtiments en passant sous l’accès actuel à la cour en débouchant dans la cuisine du logis. Cet ensemble succède à un précédent logis remontant au XIIIe siècle fortement modifié et transformé en dépendance agricole. En effet, à la fin du XVe siècle, la famille de Bastard, propriétaire des lieux, lasse de réparer les dégâts de la guerre de Cent Ans qui s’achève, préfère reconstruire un nouveau manoir. La façade Sud du logis actuel témoigne du soin apporté à la décoration par les constructeurs. Le rez-de-chaussée est doté de trois portes aux arêtes chanfreinées, dont une est une création du 19e siècle, et l’étage de trois fenêtres aux meneaux en croix.

Fontenay sur Vègre, le LogisAux deux-tiers de la longueur de la façade, vers l’ouest, se trouve une tourelle à six pans agrémentée d’une porte encadrée par une haute accolade et surmontée du blason de la famille de Bastard. Couronnée d’un habillage d’ardoises, cette tourelle renferme un escalier à vis, en pierre, éclairé de fenêtres dans l’embrasure desquelles sont aménagés des bancs de pierre. Une construction à deux niveaux dont la façade principale orientée au sud correspond au premier logis élevé par les seigneurs de Fontenay au XIIIe siècle. L’accès à l’intérieur se fait par une large porte ornée d’un décor en dents de loup, sur lequel est sculptée, au sommet de l’arc, une fleur stylisée à quatre pétales à moins que ce soit une croix proche de celle de l’ordre de Malte. Deux autres portes de même style mais seulement chanfreinées sur le pourtour, permettent d’entrer dans la cave et dans un bâtiment en retour. Au premier étage de cette façade principale, on peut voir deux anciennes souches de cheminées.

Fontenay sur Vègre, le Logis (34)Construit au XVe siècle, le pigeonnier comporte 600 boulins, ou trous à pigeons, sur 4 étages. Cette tour ronde occupe l’angle sud-est du château. Son toit en ardoises et tuiles s’appuie sur une charpente dont l’arbre central a disparu. L’éclairage est assuré par une fenêtre et une lucarne. La ressemblance des boulins avec les meurtrières présentes sur l’ensemble des autres bâtiments laisse cependant penser que l’usage de cette tour a sans doute évolué au cours des siècles.

 

 Le midi, la propriétaire met à notre disposition une salle de son logis pour un pique- nique au chaud.


L’après-midi nous découvrons dès 14h le village d’Asnières-sur-Vègre grâce à l’association du patrimoine d’Asnières. Hervé Delaune, son vice-président, nous présente le village avec passion en commençant par l’église St Hilaire qui abrite de remarquables peintures murales. Réalisées à la demande des chanoines du Mans entre le XIIe et le XVIe siècle, ces décors illustrent l’Adoration des mages, la Présentation au Temple, la Fuite en Égypte, ainsi que des scènes de l’enfer…

Fresques-eglise-st-hilaire-asnieresRecouvertes d’un badigeon de chaux depuis plusieurs siècles, ces peintures étaient ainsi protégées. Elles ont été révélées par Madeleine Pré ; elle découvrit d’abord en 1951 les peintures de l’Enfer et elle poursuivit ses travaux jusqu’en 1956. Aujourd’hui, une partie seulement est dégagée : d’une part il faut réunir des fonds importants pour les restaurer et les préserver ; d’autre part on peut supposer que les techniques vont se perfectionner et il est opportun de conserver des peintures bien à l’abri pour les décennies ou siècles à venir… Les peintures les plus anciennes remontent au milieu du XIIe siècle. À une époque où peu de personnes savaient lire et écrire, ces peintures sont des messages destinés à familiariser les fidèles avec les dogmes chrétiens. Un cours de catéchisme en quelque sorte, où religion et iconographie sont imbriquées.

Asnières sur Vègre DSCN1723Une Vierge à l’Enfant (milieu du XIIe s.) est peinte au côté nord de l’arc triomphal. Il s’agit en fait d’une fresque, réalisée alors que le mortier était encore frais. Ces peintures sont très résistantes mais il fallait peindre à la journée, ou alors utiliser ensuite d’autres techniques, ce qui explique que des parties sont plus ou moins bien conservées. Juste après, nous découvrons une Adoration des rois mages (fin XIIe s.), placée en face du portail latéral d’entrée. Ce ne serait pas dû au hasard. En entrant dans l’église, une Vierge en majesté nous apparaît et un roi est agenouillé à son côté. Asnières est une seigneurie ecclésiastique entourée de seigneuries laïques. La Vierge incarne le pouvoir spirituel ; les rois mages le pouvoir temporel. Nous avons ici un manifeste pour illustrer la suprématie de l’Église. Une volonté de faire peur… Fin XIIe –début XIIIe siècle, la mort est omniprésente. L’Église invite instamment les fidèles à suivre ses enseignements car, sinon… Pour faire obéir, on fait peur. Au fond de l’édifice, tout le revers de la façade est peint. Le Christ réussit à repousser, avec son bâton, un chien monstrueux à trois têtes, Cerbère, gardien des Enfers, et sauve ainsi quelques élus. Mais les avares, les luxurieux et les orgueilleux ont moins de chance. Les premiers sont entraînés par des diablotins vers un anti-Abraham qui tient sur ses genoux l’âme de Judas avec la bourse autour du cou… Les luxurieux sont plongés dans le chaudron bouillonnant… Quant aux orgueilleux, ils reçoivent des coups de bâton sur une grande roue avant d’être précipités dans le puits de l’oubli… L’église Saint-Hilaire propose un plus gentil avertissement, juste face à l’entrée, à l’intention des femmes bavardes. Un diable écrit tout ce que deux bavardes racontent, espérant bien réutiliser tout cela lors du jugement dernier.

Asnières sur Vègre (28)La petite cité de caractère d’Asnières-sur-Vègre est un des plus beaux villages de la Sarthe. Nous découvrons, au gré d’une promenade, son atmosphère médiévale et son patrimoine bâti au charme pittoresque : vieux pont de style roman, enjambant les eaux paisibles de la Vègre, manoir de la Cour, dit le Temple, daté du XIIIe siècle, et ses abords agrémentés d’une charmante roseraie, maisons anciennes du XVe au XVIIe siècle…

  1. Fourgeaud / Photos M. Fleury

Pour en savoir plus sur les décors peints, l’ouvrage de Christian DAVY, La peinture murale romane dans les Pays de la Loire. L’indicible et le ruban plissé, Laval, 1999, est encore disponible à la SAHM au prix de 20 € (-20% pour les adhérents).

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