-Monuments commémoratifs publics et privés autour de Ste Suzanne-
Ce n’est pas le beau temps qui fait participer aux excursions de la SAHM puisque nous n’étions que 24 à retrouver Christian Davy à Saint-Jean-sur-Erve et à le suivre à Vaiges.
L’après-midi a donc commencé par une évocation de la guerre de 1870 et plus particulièrement des combats du 15 janvier 1871. C’est à cette date que les Prussiens arrivent en Mayenne à la poursuite de l’armée de Chanzy qui opérait un repli sur Laval après sa défaite au Mans.
Les 6000 soldats du 16e Corps de la 2ème Armée de la Loire sous les ordres du vice-amiral Jaureguiberry ont stoppé l’avance prussienne depuis les hauteurs dominant Saint-Jean-sur-Erve. Cette bataille commencée par un duel d’artillerie se poursuit par d’âpres combats à la baïonnette au cours desquels s’est distingué le 22e Mobile de la Dordogne à la ferme de l’Épine. Après cette journée de combats, l’ennemi a perdu plus de 2000 hommes et renonce à prendre ces positions si bien défendues.
Trois jours plus tard, la fin des opérations militaires dans l’Ouest sera marquée par le combat de Saint-Melaine, aux portes de Laval, où les 27e et 88e régiments de mobiles repoussent les reconnaissances prussiennes.
Les monuments réalisés par souscription publique ou par l’association du Souvenir Français (1887) s’élèvent dans les communes. Celui de Saint-Jean-sur-Erve qui était à l’intersection des routes Laval-Le Mans et Saint-Jean / Saint-Léger a été ramené en 2007 près de la mairie. Entre temps, cette pyramide tronquée dont la partie supérieure est consacrée à la guerre de 1870, a vu sa base aménagée pour évoquer les deux conflits mondiaux.
Le cimetière très pentu domine le village. Les soldats tombés lors des combats ou décédés dans les hôpitaux reçoivent des sépultures particulières règlementées par la loi du 4 avril 1873: achat de concessions, entourages en fonte.
De retour dans l’église paroissiale, Christian Davy s’est attaché à décrire et décrypter les deux témoins de la Grande Guerre que sont le monument paroissial et un vitrail d’Auguste Alleaume.
En 2012-2013, les monuments aux morts peints dans les églises ont fait l’objet d’une étude par Christine Leduc-Gueye et C. Davy, publiée aux Éditions 303. Ces mobiliers réalisés pendant et après le premier conflit mondial ont été exécutés à la demande des paroissiens et, contrairement aux monuments communaux souvent de série, ils sont souvent originaux quant aux compositions et aux décors.
L’après-midi s’est poursuivi dans le cimetière de Vaiges par une visite approfondie du mausolée de la famille Robert-Glétron.
Les Robert-Glétron appartiennent à la bourgeoisie aisée, laïque, républicaine de la fin du 19e siècle.
Le choix de la construction, des décors, des épigraphies s’explique pour beaucoup dans l’histoire tragique de cette famille, le milieu social et les convictions politico-religieuses de ses membres. Les hommes sont des notables engagés en politique dont la vie s’organise entre Angers, Paris et Vaiges. Les femmes ont des activités artistiques et s’occupent d’œuvres de charité et d’éducation populaire laïques. Le fils unique, Jacques, a une solide culture générale et manifeste une vocation littéraire qui lui fait écrire romans et poèmes.
Le mausolée qui abrite les sépultures de la famille a donc été conçu pour commémorer la mort en 1892 de cet adolescent choyé de 17 ans.
Rien de religieux dans cette réalisation hormis la statue de la Vierge à l’Enfant et le vitrail de la baie surmontant la porte.
Cet imposant édifice, dont la construction s’est achevée au début du 20e siècle, est en pierres de taille de tuffeau sur un soubassement en pierres de taille de calcaire marbrier à bossage rustique. Le bâtiment imite la forme d’un temple antique avec un avant-corps de quatre colonnes doriques. Fronton, corniches, socles de statues et plaques funéraires sont gravés d’épigraphies en français, latin et grec.
En 1892, le premier projet est commandé à Léopold Ridel. L’implantation du mausolée est à cheval sur le cimetière communal et un terrain privé imaginé vers 1900 en parc de sculptures par le sculpteur L’Hoest.
Marie Robert, la mère de Jacques, perd en quelques années sa propre mère Félicité, son père et son mari.
Ce sont peut-être les décès de ses proches qui font que Marie Robert abandonne ces projets et confie à l’architecte René Goblot puis à F. Henri-Bans la construction de l’édifice que nous voyons aujourd’hui.
La statue de l’avancée est réalisée en 1913 par René Grégoire. A l’intérieur, nous pouvons admirer les vitraux d’Auguste Alleaume représentant les cinq défunts qui y sont inhumés.
Entre les représentations du Souvenir et de la Méditation est exposée une copie de la Vierge à l’Enfant dite de Nozé, œuvre de Pierre Biardeau. L’original se trouve à Angers dans la collégiale St Martin. Le morceau de vitrail du 16e siècle placé au dessus de la porte pourrait également provenir de la chapelle de Nozé près d’Écouflant.
L’influence de Marie Robert a transformé le projet qui de la pompe glorieuse chère au 19e siècle est devenu un sanctuaire dédié à l’affliction maternelle.
Vous pouvez lire une étude complète de la chapelle sous la plume de C. Davy et de N. Foisneau dans la publication De la chapelle familiale au mausolée : le monument de la famille Robert-Glétron à Vaiges – La Mayenne, Archéologie, Histoire, n°30, 2007, p.150-157 et
http://www.lamayenne.fr/fr/Archives53/Textes-en-ligne/La-Mayenne-Archeologie-Histoire/Articles_2011/De-la-chapelle-familiale-au-mausolee-le-monument-funeraire-de-la-famille-Robert-Gletron-a-Vaiges
CR et photos : J. et B. Poujade