Château-Gontier : l’hôpital

Conférence du samedi 30 avril 2011 à Château-Gontier

Des Hospitaliers à l’hôpital :
10 siècles à soigner les âmes et les corps
Animation et compte-rendu par Marcel Samson,

Association Présence du Haut-Anjou

Chapelle du Géneteil
le Buron à Azé
Annales des Augustines
Plan repère des bâtiments de l’hôpital
Dessin de Prélaval
Extrait de la charte de 1692
St Julien en 1790 reproduit par R Gauchet
St Julien en 1936
Façade sur la Mayenne
Façades côté rivière (1870)
Vue des années 1880-1885
Vers 1910
En août 2007
Clichés de cette colonne M Samson
Autres clichés B Béranger
Des Hospitaliers à l’hôpital : dix siècles de soins de l’âme au corps

L’hôpital : une idée qui ne va pas de soi  

L’hôpital incarne l’idée d’entraide entre les hommes, d’abord œuvre de bienfaisance ou de charité on parle maintenant de solidarité d’entraide sociale devant la maladie et la souffrance il s’agit de protéger des individus pauvres ou malades, des vieillards, des enfants etc. ; et au fil des siècles nous avons opéré un transfert de la sphère familiale vers des moyens collectifs et sociaux.

L’Antiquité ne connaît pas la pratique de l’hospitalité, elle n’apparaîtra qu’avec le christianisme exception faite des civilisations Grecque et Romaine qui ont reconnu les services de certaines catégories de population qui ont reconnu les services de certaines catégories de population : les soldats, les sénateurs, l’obligation est souvent et seulement alimentaire, les enfants de pauvres sont aussi l’objet d’une aide alimentaire. Il faut attendre le VI è siècle après J.C. pour que des établissements hospitaliers regroupent des pauvres, des malades, des infirmes, des vieillards, des enfants abandonnés.

À partir du Haut Moyen Age, autour de l’an mille, apparaissent des établissements hospitaliers, des maladreries, des léproseries puis plus tard l’Hôtel-Dieu pour aboutir au XXe à l’hôpital général.

Les Hospitaliers sont installés à Château-Gontier

Le sieur Gontier, Lieutenant de Foulque Nerra, a la garde du château de la rive droite la Mayenne, sa position dominante permet de surveiller tout ce qui se passe sur la rive gauche, fief des du Bignon.

La rive droite est sous domination des moines de St Aubin tandis que ceux de St Nicolas, à partir de 1097, gardent jalousement leur emprise sur la rive gauche. La confrérie des Hospitaliers fonde une aumônerie à la croisée des chemins de la rive gauche. Les Frères prônent et pratiquent la bienfaisance comme dans les grandes villes de Laval, Angers, Le Mans et Mayenne. Les Confrères souhaitent conserver leur indépendance vis à vis des moines de St Nicolas. Ils se rapprochent, en 1119, de Dom Vittal, du diocèse d’Avranches avec l’intention d’édifier un moustier. Les Confrères ne supportent pas les exigences des Bénédictins de St Nicolas, un différent naît et le pape Calixte, au cours d’un séjour en Anjou en 1119, est saisi de l’affaire, il tranche en faveur des Bénédictins.

Les Confrères obtiennent certains avantages spirituels ou honorifiques : une messe chantée, la visite du Prieur, toute absence doit faire l’objet d’un remplacement. Les Confrères obtiennent également que 14 pauvres soient nourris sur les revenus qu’ils abandonnent, les moines se partageant le reste.

L’hôpital commence à remplir son rôle dans le cadre de la pensée chrétienne : charité, générosité, don. Les donateurs sont et seront des particuliers, des nobles, des bourgeois qui par leurs actions contribuent au fonctionnement des établissements mais sauvent aussi leur âme, il en sera ainsi pendant tout l’ancien régime et après la révolution ces croyances ne diminueront que progressivement.

La charte de 1206

Les Confrères fondent en 1206 avec l’aide des Seigneurs et des Bourgeois de Château-Gontier la Maison Dieu grâce à une généreuse donation de Alard II confirmée par Alard IV et Renaud. Cet acte fondateur fixe définitivement la Maison Dieu sur la rive gauche de la rivière. Trois chartes rédigées en des termes identiques sont nécessaires pour définir les modalités entre les parties : la Maison-Dieu possèdera une chapelle avec une seule cloche, les moines du Géneteil y célébreront la messe et percevront les offrandes des paroissiens ; la chapelle sera desservie par un chapelain, celui-ci s’engagera à respecter les règles des Bénédictins d’Azé et du Géneteil ; un cimetière est accordé à l’hospice, il est réservé à l’inhumation des confrères et des pauvres décédés à l’hospice.

A partir de 1206, suite à la donation d’Alard II confirmée par Alard IV, une aumônerie est installée en bordure de la Mayenne en amont du pont puis par la suite les constructions sont toutes entreprises sur l’emplacement actuel. La Maison Dieu ainsi créée se doit : d’assurer le service divin, d’héberger et nourrir 13 pauvres ainsi que la gardienne comptée pour deux, d’assurer l’hospitalité pour les passants voir leur enterrement s’ils viennent à décéder lors de leur séjour, en contre partie, l’Aumônerie conserve la propriété de leur bien.

Les Hospitaliers quittent St Julien entre 1508 et 1516

Les Hospitaliers ont installé leur première aumônerie autour du Géneteil.

Ils exercent également des activités artisanales et commerciales dans le bas de la ville, rue de la Harelle, ce qui peut expliquer leur volonté d’indépendance. Les moines de St Nicolas concédèrent aux Hospitaliers un terrain près du Géneteil pour construire un hospice. Les confrères se contentent d’utiliser des bâtiments existant autour de la chapelle.

Marguerite de Lorraine et les Cordelières

Marguerite de Lorraine, veuve de René de Valois, seigneur de Château-Gontier, visite la ville en 1507, elle reçoit différentes plaintes concernant la gestion de l’hospice, les confrères n’assurent plus ou n’ont plus les moyens de poursuivre leur mission près des pauvres. La Maison Dieu est réorganisée avec l’accord de François de Rohan, Évêque d’Angers. Il est fait appel à 6 religieuses de la congrégation des Franciscaines au lieu des 12 prévues initialement pour assurer le service de l’hospice. Elles s’installent rue d’Audibon et ne tardent pas à demander la clôture. La rédaction d’une nouvelle règle est décidée, Gabriel Maria est chargé de son élaboration. Les Franciscaines sont entreprenantes, elles développent les constructions rue d’Audibon, organisent un jardin conventuel, la pratique rigoureuse de la règle reçoit un accueil populaire, une cinquantaine de professes sont accueillies à la communauté naissante. Les habitants ne tardent pas à s’inquiéter de la progression des effectifs et de la gestion de la Maison Dieu. Les comptes sont déficitaires, bien que la communauté en assure le financement. Une procédure judiciaire est engagée, et sur ordre de l’avocat du roi, l’effectif des religieuses est ramené à 6 par le protocole de 1560, en fait, elles restent à 9.

18 sœurs rejoignent le couvent de Champigné en 1566 ? La décision ne trouve son aboutissement qu’une cinquantaine d’années plus tard.

Le contexte des XV-XVIè

Les statuts des hôpitaux sont très variés et complexes. Ils dépendent plus ou moins des villes, des particuliers, des nobles. Leur fonctionnement est assuré par des congrégations religieuses. La mère supérieure tient un rôle essentiel voir prédominant alors que le médecin n’occupe qu’un rôle secondaire. L’évêque peut même réguler certaine fois les ressources entre différents établissements. Les ressources proviennent de dons, de biens qui permettent un fonctionnement en autarcie (Château-Gontier reçoit d’immense propriété, Beaune à son vignoble, Paris les Folies Bergères), des péages sur le pont de la ville, les biens issus de naufrage sur la rivière, etc… Toutes ces organisations conduisent à des abus comme nous venons de le voir, ils se perpétuent et génèrent des conflits d’intérêt qui auront une incidence sur le fonctionnement de l’hôpital. La fin du XVIe est agitée les guerres de religion confrontent Huguenots et catholiques. La crise de succession à la couronne de France entre Henri IV et la maison de Guise exacerbe la guerre civile, le pouvoir quitte Angers pour s’établir provisoirement au Présidial de la ville. Période difficile.

Le faubourg est détruit et construction du Buron

Par crainte des Huguenots et sur ordre du Maréchal de Boisdauphin, le faubourg sera entièrement détruit en 1593, seul le quartier du Géneteil est épargné, l’hospice et les Cordelières trouvent refuge dans le prieuré de St Jean-Baptiste après un déménagement mouvementé, la traversée de la rivière s’effectue en barques surchargées. Elles occupent des dépendances et une chapelle de l’église. En 1594 M de Boisdauphin accorde un généreux don aux Cordelières. Il leur permet de construire un couvent au Buron d’Azé. Elles s’y établissent à partir du 5 mai 1596, leur séjour à St Jean a duré trois ans. Les Cordelières conservent leur mission de soin près des malades bien qu’elles soient plus préoccupées par le service divin. Elles délèguent cette mission à des gardes malades tout en conservant les dons et legs. Un protocole est signé devant la grille du Buron sur l’insistance et l’autorité de M. de Boisdauphin. Les religieuses renoncent pour l’essentiel à l’Administration de l’hospice tel que cela était prévu au protocole de 1560. Dans les faits le protocole est appliqué à partir du 1er mai 1613.

À partir du XVII et XVIII è, l’État Royal s’intéresse à l’Hôpital.

Aux XVII et XVIII è la pauvreté augmente, elle est de plus en plus apparente dans les villes. Trois pouvoirs gravitent autour de l’hôpital, l’État Royal, le pouvoir civil des bourgeois de la ville et toujours l’église avec les congrégations religieuses. La pauvreté est souvent considérée comme de l’oisiveté, comme un vice, donc on l’enferme. Les pauvres deviennent plus nombreux on refuse ceux qui ne sont pas du pays, l’esprit de charité recul. Les idées nouvelles germent, la pauvreté va bientôt être considérée comme un défaut des structures sociales, Rousseau, Diderot, Voltaire engagent les débats.

Les Pères des Pauvres administrent la Maison Dieu

Un dessin datant de 1670, montre l’emplacement de la construction, ce plan est repris sous une autre forme par R. Gauchet qui montre l’organisation des locaux qui seront démolis à la fin du 18ème. Les Pères des Pauvres, élus par les représentants de la ville, sont devenus les premiers Administrateurs civils le 29 avril 1613, ils sont trois et ils se répartissent la tâche et s’acquittent, pour un temps, de cette mission avec beaucoup de compétence. Le premier constat, c’est le délabrement de la Maison Dieu, elle a été démolie sur ordre de Boisdauphin, des parties ont été reconstruites ou réaménagées et la première mission consiste donc à préparer et mettre en œuvre la reconstruction des édifices, c’est à François Allaire que revient la charge des bâtiments et de leur gestion financière en dépenses et recettes.

Une assemblée générale des représentants de la ville décide, le 10 mai 1619, de la reconstruction de l’hôpital et les propositions sont présentées aux habitants. Les travaux dureront environ cinq années. Ce document nous indique la présence de deux constructions, le 1er datant vraisemblablement de 1206, remanié sans doute, la démolition s’effectuera à la veille de la révolution en 1788 il a été occupé par un apothicaire et le corps de garde des gabelous, le second en appendice sur le bâtiment qui a abrité des latrines et démoli après la révolution.

Les épidémies sévissent sur le Maine et l’Anjou

À partir de 1613 et pendant près d’une cinquantaine d’année les épidémies de dysenterie, de peste et de choléra sévissent sur le Maine et l’Anjou. Château-Gontier n’échappe pas à ce fléau qui sera suivit par une période de famine vers la fin du 17ème. Pendant les épidémies, la closerie du Bois Plaidé sur la rive gauche de la Mayenne est devenue le lieu ou les malades sont mis à l’isolement. Les chasses gueux interdisent la ville aux étrangers. Ils veillent à ce que toutes personnes malades ou en contact avec un malade soit identifiable. On tente de réquisitionner les médecins, sans succès, seul François Bahier se porte volontaire, à priori, il manque d’expérience car on lui promet en 1626 de le recevoir maître chirurgien sur simple interrogatoire, sans chef d’œuvre, ni examen. Il survivra aux épidémies. Devant l’importance de la tâche les Administrateurs tentent sans succès de faire appel aux sœurs hospitalières de La Flèche, la règle applicable à cet ordre nécessite préalablement une révision. Il est fait appel à des laïcs pour assurer les soins aux malades

La Maison Dieu prend de l’essor

La Maison Dieu fait appel aux médecins et chirurgien de la ville pour les consultations et les prescriptions aux malades. La nécessité de disposer de personnels s’occupant plus particulièrement des malades et des interlocuteurs directs de médecins conduit à recruter deux femmes à partir de 1664, elles ont notamment en charge l’apothicairerie. La restauration est particulièrement alléchante, dans la liste des aliments achetés ont trouve de la viande de boucherie, du poisson de mer et de rivière, des huîtres, des oranges, des cerises, des prunes, du vin et du cidre. Tous les malades en bénéficient que l’on soit pauvre ou payant pension. Claude Le Drogo, prêtre dévoué de l’hospice et observateur attentif du développement de l’établissement tente à plusieurs reprises de convaincre les Administrateurs de la nécessité d’intégrer une communauté de religieuses.

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