Visite du 31 mai – Château de la Boissière et Craon

 

La Boissière 001Visite du château de la Boissière par son propriétaire.

La première construction du 12e siècle n’est constituée que d’une haute tour quadrangulaire, au nord-est, sans fondation, qui domine une douve alimentée par le Chéran.

Aux 13e et 14e siècles, une seconde tour quadrangulaire de trois étages, est accolée à la première entre lesquelles est édifiée une tourelle d’escalier à vis. Aux 14e et 15e siècles, un logis complète l’ensemble qui devient une maison-forte, sur un plan rectangulaire, avec au moins une tour ronde transformée plus tard en four à pain. Les matériaux sont le grès bleu de Craon, le roussard et le schiste.

Des percements successifs ainsi que la construction d’une haute cheminée dans le logis ont modifié des pans de murs. Le château a été occupé quelques années par les Anglais pendant la guerre de Cent Ans. Restitué en 1362 au traité de Brétigny, il appartient ensuite à des familles militaires jusqu’à la Révolution.

A partir des années 1990, MM. Gérard et Michel Roussiez, nouveaux propriétaires, ont sauvé le château d’une mort certaine en le restaurant au plus près de son évolution architecturale historique.
Les charpentes et couvertures ont été réhabilitées, les cheminées relevées, les sols repavés, les murs enduits, l’escalier habillé de schiste local, les pièces meublées. Une douve a été recreusée, la cour a été redessinée donnant au château et à ses bâtiments annexés une forte attractivité.

Visite guidée de Craon par Madame E. Ernoult

Permettez que la ville se présente :

Elle pâtit de certaines faiblesses telles qu’une desserte routière insuffisante (celle qui fut ouverte par corvée au milieu du XVIIIe siècle entre Laval et Nantes a gardé pratiquement sa configuration). Elle la maintient dans un certain isolement économique mais non irréversible comme l’ont montré les perspectives présentées par le maire Claude Gilet. La population est en baisse depuis le début du XXIe siècle (– 300 hab. en 15 ans). Mais Craon bénéficie de la présence de la laiterie Lactalis, N°1 mondial, qui assure désormais plus de 500 emplois, d’importantes entreprises de transports et d’activités para-agricoles.

La ville a, dès le Moyen Âge, assuré de grosses foires en relation avec la Bretagne voisine, puis s’est enrichie à partir du XVIIe jusqu’à la Révolution d’un important marché du fil de lin.
Siège d’une seigneurie et d’un grenier à sel, de plusieurs monastères, elle a, outre une population marchande, abrité nombre de fonctionnaires qui en ont fait une ville bourgeoise.
Ruinée par la guerre civile, elle a su rebondir au XIXe siècle grâce au développement agricole encadré par des grands propriétaires qui ont ramené la prospérité.
Elle a su entretenir et développer sa notoriété équestre née d’un hasard de l’histoire : la création d’un haras seigneurial par le dernier baron, Pierre-Ambroise de La Forêt d’Armaillé.
Chaque année, 50 000 turfistes assistent et parient à des courses de renommée nationale et internationale.

 

Parlons de la ville-close :

Craon - 038Craon - 064Craon fut l’une des 32 villes closes d’Anjou. Depuis le XIIIe siècle, ses murailles se développaient sur 1300 m, plus 300 m autour du château-fort. Flanquée de 27 tours et de 4 portes, la ville appartenait à la ligne défensive des forteresses de la zone des marches, face aux citadelles bretonnes.
Les origines de la ville elle-même sont connues dès le IXe siècle quand le comte de Nantes Lambert commença avec des Vikings la conquête de l’Anjou et du Maine. Une motte féodale a marqué son implantation.
Mais des découvertes archéologiques ont montré que le peuplement lui est bien antérieur, par la présence de débris de sarcophages en calcaire coquillier relevés par Jean-Claude Meuret dans les vestiges de l’ancienne église Saint-Clément, traces d’un cimetière mérovingien au VIe siècle dont l’implantation s’est perpétuée jusqu’en 1861 ; il y a une dizaine d’années celles dans la cave d’une maison, de vestiges de colonnes gallo-romaines datées de la fin du IVe siècle par Yvan Maligorne – ils doivent être mis en valeur dans la mairie cette année – et enfin tout récemment celle d’un villa gallo-romaine par Alain Valais de l’I.N.R.A.P. sur le site occupé par la nouvelle gendarmerie.
Saint-Clément fut donc le berceau du peuplement craonnais qui s’aggloméra à partir de ces implantations primitives. Cette zone rurale de la commune qui entourait la ville-close comme un fruit autour de son noyau, est devenue le siège d’une seigneurie ecclésiastique en concurrence avec la seigneurie militaire de la ville-close. Ce n’est qu’en 1812 que les deux territoires ne formèrent qu’une seule et même commune.

 

Evoquons l’originalité de l’urbanisme craonnais :

A la différence de Château-Gontier qui s’est principalement développé à sa périphérie au XIXe siècle, Craon a choisi une autre option. Dès le XVIIIe siècle, la ville tenta de modestes efforts pour faire sauter les verrous qui l’enfermaient afin de se procurer de nouveaux espaces publics et circuler plus facilement.
En 1750, les redoutes au-devant les portes de ville commencèrent à être démantelées, les habitants percèrent des portes privées pour sortir librement dans les douves.
En 1770, le marquis d’Armaillé fut contacté pour autoriser le passage de la circulation par son parc afin de soulager celle de la ville, en juillet 1789 il fut contraint de céder la place Saint-Nicolas et de restituer le pré dit depuis « de la Liberté » qu’il s’était accaparé.
Enfin en 1799, Volney, l’enfant célèbre du pays, fit une proposition pour éviter le parc.

Des obstacles s’opposèrent pendant une trentaine d’années à de nouveaux progrès. Après avoir fait raser par des chômeurs l’ancienne motte féodale dont la terre servit à combler les douves à l’est de la ville, la guerre civile imposa de consolider les murs et les portes.
Il fallut attendre 1818 pour voir l’espace libéré à l’est devenir des Promenades et commencer son nouveau rôle : celui d’un champ de foire et une zone de circulation, mais toujours extérieure.

Des événements déclencheront l’ultime solution pour l’intérieur :
* – En 1828, le monastère des Dominicains est racheté. La mairie et la Justice de paix, la gendarmerie doivent le quitter.
* – En 1830, le changement de gouvernement met en place de nouveaux édiles.
* – En 1836, la route de La Guerche est ouverte au-delà du faubourg.

Les nouveaux propriétaires du château refusent toujours l’usage de leur parc.
Reste une seule solution pour cette ville pauvre :
couper la voirie médiévale intérieure par une Nouvelle Traverse. Pour assurer la cohérence de l’ensemble, chaque carrefour entre les deux voiries sera constitué de pans coupés en tuffeau.

Evolution du chantier :

* – En 1835, un plan d’alignement est retenu.
* – En 1840, un nouveau pont traverse la rivière et l’abreuvoir qui se trouve à son entrée est comblé puis loti pour rentabiliser l’opération.
* –
En 1847, la mairie est inaugurée. Enfin, un prêt de l’Etat soutenu par le duc d’Aumale et les 37 plus imposés de la commune qui acceptent des charges plus lourdes, fait sauter le dernier verrou ; la vieille collégiale, usée par les siècles est démolie et reconstruite sur la colline où le vieux château avait été démantelé en 1604. Les maisons du sacristain et du Roquet qui flanquent la colline contribuent à l’étayer de même que l’escalier monumental qui mène à l’église.

Saint-Nicolas :

CraonSt Nicolas (25)Craon St Nicolas (23)       Craon St Nicolas (16)

La nouvelle église est de « style cathédrale » : tout le vocabulaire gothique du XVe siècle est mis au service de l’architecture, du mobilier cultuel, du vitrail et des premières fresques. Longue de 50 m sur 23, haute de 20 m, maintenue par de hauts contreforts qui plongent à 6 m de profondeur, elle est consacrée en 1856 alors que les bas-côtés ne sont pas terminés, mais la population est lasse des travaux !

 

Les vitraux des Carmélites du Mans et d’Auguste Alleaume constituent une anthologie de la renaissance de cet art perdu, entre 1855 et 1925. Les peintures murales réalisées par Ludovic Alleaume et Ladislas Dymkovski, un exceptionnel programme décoratif, tant sur les autels de pierre que sur les murs du chœur et des bas-côtés où se côtoient l’art religieux industriel du XIXe siècle et une créativité inspirée de l’Art Nouveau.

Autres découvertes :

 * – L’hôtel XVIIIe néo-classique du chanoine Constantin Gendry, grand-oncle de Volney, miraculeusement conservé. Rue de l’Ancien Collège, propriétaire Mme Rébillard.
* – Le Grand Saint-Pierre, un majestueux immeuble de rapport, de style Renaissance composite, planté sur la Nouvelle
* – Le merveilleux décor recomposé de la chapelle des bénédictines. Le dôme intérieur enluminé par Ladislas Dymkovski surplombe l’autel délicatement éclairé, créant une incomparable atmosphère de recueillement.
* – Le pré de la Liberté et son lavoir.
* – La perspective sur l’Oudon où se rencontrent les deux urbanismes, médiéval avec son boulevard d’artillerie et son pont en dos d’âne ; moderne avec ses quatre maisons néo-classiques constituant les portes neuves, mais ouvertes, de la ville.
* – La cour de la Geôle, ancien « tombeau des mendiants » et des contrebandiers du sel.
* – Les halles reconstruites en 1482 puis en 1850 pour occuper les chômeurs.

 

Un pot convivial offert par M. le Maire a clos cette promenade.

 

 

  1. 1. Ernould

 

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