Excursion du 27 mai – Saint-Denis-du-Maine et Arquenay.

C’est un groupe d’une cinquantaine de personnes qui a été accueilli par monsieur Bernard Boizard, maire de Saint-Denis-du-Maine et président de la communauté de communes de Meslay-Grez ainsi que par madame Thérèse Heaulmé, présidente de l’association pour la restauration de l’église St Denis. Après un café offert par l’association, les visites ont commencé par celle de l’église en compagnie de nombreux habitants de la commune, gage de l’intérêt des dionysiens pour leur patrimoine.

 

Visite de l’église de Saint-Denis-du-Maine par J. Naveau.

Bien que le territoire de Saint-Denis ait été mis en valeur avant l’Antiquité, la fondation de l’église, autour de laquelle le bourg s’est aggloméré, demeure une énigme. Il n’y a pas trace d’un cimetière du haut Moyen Âge pouvant expliquer son implantation selon un modèle fréquent (mais non général). À la fin du 11e siècle, l’édifice appartient à la famille de Saint-Denis, vassale de Bazougers, c’est-à-dire de l’un des principaux points d’ancrage de la seigneurie de Laval dans sa partie orientale.St Denis, église 1

Cela explique l’intérêt que l’abbaye mancelle de la Couture porte à Saint-Denis-du-Maine. Proche du pouvoir comtal, celle-ci accompagne sa politique de contrôle des principaux vassaux, notamment des Laval dont on n’oublie pas que le château a été fondé sans l’autorisation du comte. Aussi, quand, vers 1110, les Saint-Denis donnent leur église à l’abbaye dans le droit fil de la réforme grégorienne, un prieuré est créé, moyen de prendre en main la paroisse au plus près des seigneurs laïcs.

De cette période datent deux parties romanes. La nef doit être antérieure à la cession. La tour-clocher, dont l’appareillage est différent, peut constituer une première réalisation des moines de la Couture.

Au 13e siècle sans doute, le chœur est agrandi pour répondre aux besoins liturgiques des moines. Fait exceptionnel, il est accosté de deux chapelles ouvrant largement sur le sanctuaire et dédiées à saint Pierre au nord (aujourd’hui disparue) et à saint Blaise au sud. Les travaux sont suivis de la réalisation d’un décor peint dans le chœur (messe, saint non identifié dans l’embrasure de la fenêtre sud) et dans la nef (faux appareil, Christ descendant aux limbes). Vers la fin du 14e siècle, la belle représentation d’une Famille de donateurs présentée par saint Georges à la Vierge est peinte sur le mur sud du chœur.

Un décor nouveau est réalisé au 15e siècle dans la nef. Il en subsiste les images de saint Michel, de Sainte Opportune et de Saint Christophe.

St Denis, église 2

Au 16e siècle, les guerres de Religion affectent durement l’édifice, dont la nef est incendiée par les Huguenots en 1568 et qui est vandalisé en 1593 par les troupes royales.

Le 17e siècle est une période de grande activité. Cela débute, de 1609 à 1612, par la construction du retable principal, l’un des rares témoignages de la transition entre la Renaissance et l’âge d’or des retabliers maniéristes lavallois. L’œuvre est complétée, en 1644, par un tableau offert par Françoise de Cervon, veuve de Lancelot de Quatrebarbes. Un tabernacle en marbre et tuffeau est accolé au mur sud. Puis vient la construction de deux nouvelles chapelles formant transept. Celle du nord, construite rapidement en 1631, est dotée l’année suivante d’un retable de Tugal Caris, représentatif du style lavallois. Enfin, en 1684, l’église se dote d’un remarquable portique en bois habillant l’arc triomphal et supportant un Calvaire.

Le 18e siècle encadre l’entrée du chœur de deux nouveaux autels dédiés à la Vierge et à saint Sébastien. La chaire date aussi de cette époque.

Entre 1893 et 1925, des vitraux sont posés dans le chœur et sur la façade, ce dernier étant dû à Auguste Alleaume.


 

Le château du bourg par J. Poujade.

Le premier seigneur connu est Drogon de Saint-Denis qui en 1040 signa comme témoin la donation de diverses terres. Selon Dom Piolin dans l’Histoire de l’église du Mans, Philippe de Saint Denis aurait perdu son fils unique et aurait cédé son château féodal, situé au centre du bourg, aux Templiers qui en auraient fait le siège d’une commanderie, laquelle aurait subsisté jusqu’à l’an 1312 époque de la suppression de l’ordre du Temple. Ainsi s’expliquerait le nom « le Temple » encore porté de nos jours par la ferme qui se trouve derrière l’église et presqu’attenante à cet édifice. A ce jour, aucun vestige de ce château n’a été identifié.

Le château actuel a été construit vers 1850 par la famille de Coniac. Il été occupé par un état-major prussien commandé par le colonel Von Schmitt. L’état-major s’est replié après le 17 janvier 1871. De cette occupation il reste quelques noms et graffitis au 2ème et 3ème étage.

Le domaine a été vendu par Augustin de Coniac et Marie Françoise de Hercé son épouse à un industriel, M. Schmit, gérant de la Société civile immobilière du château de Saint-Denis.

Depuis 1996, il est la propriété de l’association de la Cité de l’Immaculée qui accueille des personnes en difficulté.


 

La Motte par A. Guéguen.

A la Motte, nous sommes accueillis par madame et monsieur de Saint-Vincent qui nous accompagneront tout au long de cette journée. Qu’ils soient ici remerciés pour leur implication dans les visites et leur accueil.

A 300 m du bourg de Saint-Denis-du-Maine, le site médiéval, isolé, est composé d’une motte castrale de forme oblongue de 20 à 30m, d’environ 5 m de hauteur, ceinte d’un fossé toujours en eau de 6 m de largeur. Au sud-ouest, les fossés, partiellement en eau en 1835, cernant une basse-cour ovalaire de 60 m de longueur entouraient deux bâtiments parallèles dont le plus ancien, un logis présentant une continuité architecturale malgré des remaniements, semble construit au 14e s comme l’attestent des ouvertures. Face au logis, la grange a été profondément remaniée mais présente probablement son volume d’origine. Face à la motte, un bâtiment agricole du 19e s, était inclus dans l’enceinte en eau aujourd’hui comblée de la basse-cour. Tout ceci signe un important site castral qui a pu se constituer localement sous la suzeraineté des Hardret, seigneurs de la Chapelle-Anthenaise puis de Bazougers, et d’Arquenay, fondateurs de bourgs au 11es.

Cette organisation châtelaine n’a pu se faire sans l’accord des Gui de Laval, possesseurs du château (fortalicium) de Meslay, détruit lors de la Guerre de Cent Ans mais qui conserve sa trace dans l’urbanisme.

St Denis, la Motte 2

Dreux de Saint-Denis est-il en 1040 le premier possesseur laïc de l’église ? Guillaume qui lui avait succédé vers 1100 est-il le châtelain de la Motte ? La paroisse de Saint-Denis – comme sa voisine la Cropte – est à l’évidence extraite d’un territoire plus grand et a pu précéder l’érection de la butte seigneuriale. Eglise et motte castrale sont installées juste sur le cercle périphérique de deux grands défrichements médiévaux de plus de 500 m de diamètre et s’ignorant. Le rôle militaire du seigneur est évident. Toutefois, la motte et sa basse-cour bien visible, même si ses bâtiments d’origine ont été remplacés dès le Moyen Age, plaide pour un projet agricole d’exploitation d’un riche terroir qui essaime en cercles concentriques dans toute la partie sud de Saint-Denis. Au contraire, le nord du territoire, appuyé sur une voie gallo-romaine, reste découpé en segments orthogonaux, héritiers de l’aménagement antique confirmé lors de la construction de la LGV (ligne à grande vitesse).


Coudray. Visite par Mme de Saint-Vincent et J. Poujade.

En 1312, un Philippe du Coudray était possesseur de cette terre. Avant la fin du 14ème, elle passe à la famille des de Fallais mais une branche cadette des Coudray demeure jusqu’au 17ème s. sur la terre de la Vaugottière en Arquenay. En 1453, le Coudray passe par mariage dans la famille de Maillé.

Coudray châteauLes seigneurs du Coudray étaient donc à la fois vassaux des seigneuries de Saint-Denis–du-Maine et de la Cropte ; ils l’étaient aussi de l’Abbé et des religieux de l’abbaye de Bellebranche pour une métairie en Chémeré-le-Roi.

Toujours par mariage, le Coudray passe au 16ème siècle dans la famille des Rotours. C’est à Robert II des Rotours, que l’on doit l’extension des bâtiments : le logis initial était dans l’aile arrière du château actuel, perpendiculairement à la grande façade. La tour escalier du 14ème a été remaniée. Les enduits rendent aujourd’hui impossible la datation des diverses phases des constructions.

Pendant les guerres de Religion, Coudray tient pour la Ligue. C’est aussi le lieu où sont mis en sûreté les objets du culte et les biens les plus précieux des paroisses des alentours.

En 1593, les anglais stationnent à Saint-Denis et «avoient faict leur corps de garde en l’église dudit Saint Denys, et feirent brusler la chaire prédicatoire, les pulpistres, les bancs du Couldray, de Lucé, de Marpalu, et tout ce qu’il y avoit de coffres en ladite église, en l’un desquels estoit demeuré fortuitement le livre et papier baptistaire fort antien qui y fut perdu et volontiers aussy bruslé ».

La chapelle qui se trouve près de la fuye est un édifice probablement édifié au 16e siècle et il se raconte qu’il a succédé à un plus ancien.

Coudray chapelle pigeonnier

Le chevet est percé d’une belle fenêtre gothique ornée d’un vitrail moderne (1943) et le seul accès est une petite porte dans le mur gouttereau sud. Les cœurs portant les initiales GR ont soulevé bien des questions dont la réponse nous a été donnée par A. Gomez : il s’agit d’ex-voto aussi nommés cœurs de dévotion et les initiales signifient « grâce reçue ». En l’absence d’initiales, ce sont des reliquaires.

En 1636, dans la succession de Radegonde des Rotours, la terre du Coudray passe à la maison des Sévigné avec Renaut, conseiller au parlement de Bretagne, qui épousera en secondes noces, Gabrielle du Bellay. Celle-ci décède en 1653.

Au 17ème siècle, René-François de Sévigné, seigneur du Coudray, est harcelé par les créanciers ; deux rentes importantes sont en cause au premier chef. La situation empire avec ses successeurs. En 1704, château, terres, métairies, rentes, etc.… sont saisis et mis en adjudication. L’enchère est enlevée par Me Destouches en 1715 au profit de François Coustard, seigneur de Souvré.

Françoise de Quatrebarbes, comtesse de la Motte, opère sur François Coustard, le retrait féodal de la terre du Coudray, qui est réalisé en 1719. Sous l’ancien régime, chaque fois qu’une terre noble passait, par suite d’une vente, à un nouveau propriétaire, le seigneur dont relevait la terre vendue avait le droit de la reprendre sur l’acheteur en remboursant à ce dernier le prix qu’elle lui avait coûté. La comtesse sollicite de Mgr de Froullay, alors évêque du Mans, la permission de faire célébrer la messe dans la vieille chapelle de son nouveau manoir, permission qui lui fut accordée le 27 septembre 1724.

A cette époque, le Coudray est ainsi décrit « …. avec toutes ses appartenances et dépendances, bâtiments, cours, fuye ou colombier, chapelle, jardin et brosse ou bouquet de bois en iceluy, le tout enclos de fossés doubles, lequel château avec tout ce qui en dépend, formant le préciput de ladite demoiselle de la Motte aînée, a été estimé par le rapport du sieur Etienne Mondières, du 1er juillet 1763 … la somme de 9.000 livres, eu égard à ce qu’il est nécessaire d’y faire pour 3.000 livres de réparations pour le mettre en bon état… ». Une de ses deux filles qui en hérite, épouse en 1766 Jacques-Charles, comte de Croixmare originaire du pays de Cau, mestre de camp de cavalerie. La jeune femme décède en 1768 à 21 ans en laissant deux filles en bas âge.

Le comte de Croixmare fait élever, à droite et à gauche de la cour qui précède le château, les écuries et les remises que l’on y voit de nos jours ainsi que, en prolongement de la façade, les deux pavillons qui la terminent. C’est probablement de cette époque que datent le remplacement de l’ancien pont-levis par le pont dormant en pierre et la réalisation de la grille monumentale qui lui fait suite ; chacun des pilastres portait autrefois un lion en pierre, animal figurant sur les armes des Croixmare.

Les successeurs vendent le Coudray en 1803 à M. Guillet de Préau. A sa mort, Coudray échoit à la fille Clothilde, épouse d’Edouard Le Monnier de Lorrière. En 1903 il appartient à la comtesse de Montalembert, née Guesdon de Beauchesne, petite fille de madame de Lorrière. Le château a été restauré en 1894 par l’architecte nantais Lediberder.

Cette visite a également été l’occasion de découvrir des éléments du « petit » patrimoine intéressants comme le pigeonnier équipé d’une pompe à bras au rez-de-chaussée et d‘une citerne au 2ème étage permettant l’arrosage par gravité, des puits, et un chariot de levage (18ème s.) pour déplacer les bacs d’orangers (photo ci-contre).


 

Église Saint-Germain d’Arquenay. Visite par J. Naveau, G. Barré et J. Poujade.

 

Cette église rentre dans les stéréotypes mayennais des édifices fortement remaniés au 19e siècle mais qui ont conservé une nef romane avec son petit appareil assez régulier et une petite fenêtre dans le mur gouttereau nord ainsi qu’un chœur plus étroit qui a pu être daté du 13ème siècle si on se réfère aux vestiges de la fenêtre du chevet. Cette dernière a été remplacée au 15ème siècle par une vaste baie à remplage. Le rôle de la dépression que l’on peut observer dans la partie nord-ouest du mur de la nef reste une énigme ; accès à un autre bâtiment, désordres dans la maçonnerie ??

Au 17ème siècle, une fenêtre destinée à éclairer le retable du maître-autel a été créée dans le mur sud du chœur. Ce retable est une œuvre de Jean Simon, sculpteur angevin de la fin du 17e s.

Arquenay 02

Vers 1860 l’édifice a subi l’ajout des chapelles formant transept, l’élévation d’une tour-clocher et le percement de fenêtres néo-gothiques.

Des tranches de travaux sont annuellement effectuées par la commune et l’entretien quotidien est le fait des habitants. Un bel exemple qui pourrait être copié par de nombreuses communes.

Près de l’église, une belle porte ogivale pourrait être un vestige de l‘ancienne aumônerie.

 

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