Domfront

 

 
Dimanche 30 juin : Découverte du patrimoine du pays de Domfront (Orne)
Compte-rendu par Monique Guéguen et Joël Poujade
25 adhérents de la Société se sont retrouvés à Domfront pour une journée préparée, dans une démarche associative, par monsieur et madame Le Bigot.
 

Monique Guéguen, présidente
Mme et Mr Le Bigot
Anne-Laure, notre guide
Mr Fourcade (la Chaslerie)

 

 

De 10h à 12h30, nous avons parcouru la ville ancienne en commençant par l’espace du château. La fondation de la ville est due aux seigneurs de Bellême vers 1010. Un château primitif en bois a été élevé notamment pour imposer l’autorité sur cette zone tampon du Passais entre la Normandie et le Maine. C’est une position stratégique sur un éperon rocheux qui domine très abruptement la Varenne. Guillaume le Conquérant le confisque et le Passais annexé à la Normandie. Au 12ème, Domfront passe à Henri 1er Beauclerc, futur roi d’Angleterre qui fortifie cette frontière normande. Il agrandit l’enceinte et fait élever vers 1120 le puissant donjon dont on voit encore aujourd’hui les importants vestiges. On décèle également sur cet espace les fondations d’une aula et les ruines d’une très vaste chapelle.Sur la partie orientale de la douve sèche, une courtine à gaine aménagée dans l’épaisseur des remparts et percée de meurtrières court sur une longueur importante, dans un état de conservation étonnant. Ce château fut démantelé en 1608 sur l’ordre de Henri IV.

 

 

Une déambulation dans la ville a permis de se rendre compte du nombre élevé d’anciennes maisons à pans de bois et de l’effort de réhabilitation entamé. Les plus anciennes sont des 14éme et 15éme. La plus souvent, elles s’avancent en encorbellement et quelques unes possèdent un soubassement en bois. nous avons ainsi découvert la place saint Julien, la grande rue, la rue du docteur Barrabe. D’élégants hôtels particuliers, comme celui de la famille Marie du Rocher, furent construits au 17éme essentiellement par des officiers royaux. Dans une maison du 16e siècle nous avons eu le privilège, grâce à Mme et à M. Le Bigot, d’accéder aux caves communément désignées sous le nom de « prison des anglais ».

 

 

 

Pique-nique à la Chaslerie

 

La Chaslerie.
Le fief de la Chaslerie était sous la suzeraineté de la baronnie de Lonlay qui était une possession de l’abbaye bénédictine. Bâtie à proximité du Gué-Viel, elle a pu en assurer la défense et prélever un droit de passage. La description de L. Blanchetière dans les « Notes recueillies sur l’arrondissement de Domfront, au mois d’avril 1852 » est toujours d’actualité : «  A droite de l’entrée est le principal corps de logis, composé d’un vaste rez-de-chaussée et d’un premier étage …. Le toit de cette aile est fortement surélevé. Deux des angles diagonalement opposés sont flanqués chacun d’une tour cylindrique couronnée d’un toit conique très aigu et très gracieux. Au centre de ce corps de logis est un vaste escalier de granit, dont les larges volées sont séparées par un mur…… ».

On retiendra entre-autre la porte du corps de logis surmontée du blason des Ledin « d’azur fascé, à trois étoiles en tête, un cœur en pointe, le tout d’or » que nous retrouverons dans la chapelle.

Face au logis et de gauche à droite, un bâtiment en longueur avec combles à la Mansard puis un pavillon de style Louis XIII à la toiture très pentue et fermant la cour et rejoignant le logis, un corps de bâtiment plus bas. Les différentes dates gravées dans le bois et la pierre sont 1598 et 1765. Sur les différentes toitures, les épis de faîtage retiennent l’attention.

Entourée sur trois côtés par un large fossé, la Chaslerie forme un « village » ou l’on trouvera chapelle ainsi que pressoir, fournil, puits et autres dépendances lui assurant une quasi-autonomie. A noter que la chapelle dédiée à sainte Anne a été décorée de peintures aux 16e, 17e et 19e siècles.

Il faut également retenir l’aspect défensif avec les nombreuses embrasures pour armes à feu que l’on retrouve dans les bâtiments (y compris la chapelle) et les murs d’enceinte.

Le manoir appartient à la famille Ledin jusqu’à la révolution de 1789. Cette famille qui de la roture s’est élevée progressivement grâce à sa fortune et ses alliances a vu ses prétentions limitées aux charges locales : la reconnaissance d’une ancienneté de noblesse lui a même été refusée par le généalogiste du 17e siècle d’Hozier. La « savonnette à vilain » à ses limites.

Au début du 20e siècle la plupart des bâtiments sont à usage agricole. En 1947, G. Lasseur décrit la Chaslerie comme s’enfonçant progressivement vers la ruine ; « C’est le sort de la plupart de ces vieux manoirs, qui n’abritent qu’un fermier et quelques souvenirs. Cependant, la Chaslerie a toujours grande allure, le lierre s’efforçant de masquer ses plaies….. ».

Mais, achetée en 1991 par l’actuel propriétaire, la Chaslerie revit. La restauration de ce site classé en 1995 se poursuit.

L’étude historique quant à elle reste à faire et devrait se révéler intéressante puisque le chartrier a été dispersé à la révolution de 1789.

Sources :

– M. Pierre-Paul Fourcade, propriétaire de la Chaslerie

– Châteaux et manoirs de la région de Domfront, G. Lasseur, Jouve § Cie, Paris, 1947 – réimpression 2007.

Pour en savoir plus : le site internet de la Chaslerie

 

 

 

L’église Notre-Dame-sur-l’Eau
L’église de Notre-Dame a été fondée au début du 11e siècle et certains auteurs avancent le nom de Guillaume de Bellême. Ces mêmes sources disent que ce dernier en fait don à l’abbaye de Lonlay qui crée un prieuré. Les mêmes affirment que les plus grands personnages y vinrent : Guillaume le Conquérant, Henri II d’Angleterre, Thomas Becket, Richard Cœur-de-Lion, Jean Sans-Terre, Philippe Auguste, Robert d’Artois ,Saint Louis dont la grand-mère, Aliénor née en 1161 au château de Domfront aurait pu y être baptisée… et bien d’autres. Tout ceci relève des écrits des érudits du 19e siècle qui ne se privaient pas pour « améliorer » l’Histoire à défaut de preuves.Les travaux de L. MUSSET et de M. BAYLE, permettent d’affirmer que sa construction est due à Henri Beauclerc, Seigneur de Domfront depuis 1092..

Ce qui est prouvé sont les épreuves que traversa l’édifice au cours des siècles ; guerre de Cent-ans, ravages des huguenots, révolution de 1789 où elle est pillée puis transformée en magasin à fourrage puis en salpêtrière. L’époque contemporaine n’est pas en reste puisque après avoir tenté de la faire raser, la municipalité vote la disparition de plusieurs travées de la nef ainsi que des bas-côtés afin de permettre le passage de la route vers Mortain en 1836. La précision légendaire des bombardements alliés l’endommagent en 1944.

Disparus les bas-côtés avec leur maçonnerie en arêtes de poisson, les chapelles aménagées dans les arcades latérales avec leurs autels de St Nicolas, Ste Anne, St Denis, St Michel, St Pierre, St Yves et St Roch. La couverture de la nef était en tuiles.

L’édifice dans son état actuel est un bel exemple d’art roman avec ses contreforts plats, son chœur en cul de four et ses absidioles à modillons sculptés. Le massif triangulaire de l’autel rappelle celui de Fontaine-Géart. Les peintures murales du 12e et les repeints du 15e siècle ont été déposées et présentées dans les absides. Une très belle Vierge à l’Enfant du 14e siècle en pierre polychrome est adossée à un pilier et on peut être surpris par le visage caricatural d’adulte de l’Enfant-Jésus qui contraste avec celui de la Vierge dont les traits sont minimalistes.

Outre de très belles baies géminées, le pignon nord est orné d’une statue dont la légende comme la description offrent leur lot d’interrogations.

La visite de ce lieu d’exception ne serait pas complète sans un regard au gisant attribué à Pierre Ledin de la Chaslerie (1601) ce qui peut paraître curieux étant donné le modèle de l’armure et la datation de la seconde moitié du 15e siècle donnée par d’autres sources.

Les dalles funéraires qui couvraient le sol de l’église (tout au moins celles qui ont échappé à la destruction) se partagent l’intérieur de l’église et les alentours de la croix de placître. Peut-être trouveront-elles un jour un lieu plus adapté avant d’être complètement illisibles.

Cette splendide construction mériterait également une étude complète afin de lever les à-peu-près et les incertitudes qui accompagnent son histoire.

Sources : le Domfrontais Médiéval N° 6, Gilles SUSONG

 

 

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