Excursion du dimanche 28 mai à Saint-Hilaire-du-Maine et à Juvigné.
En guise d’introduction, nous adressons nos plus vifs remerciements à messieurs Yannick Arcanger et Rémi Rose de l’association Patrimoine vivant de Saint-Hilaire-du-Maine, qui nous ont accueillis et guidés tant à la Templerie qu’à Saint-Hilaire-du-Maine ainsi qu’à Guillaume Lhuisier pour son aide dans la préparation de la visite du Haut Rézeul.
Chapelle de la Templerie.
Selon les Insinuations ecclésiastiques (18e s.) et Davelu, la chapelle de la Templerie est dédiée à l’Assomption de la Vierge et à saint André. Ce dernier vocable secondaire fait surtout référence à l’assemblée du bourg le 30 novembre. Elle est aussi connue sous le nom de Templerie d’Echerbay. Tour à tour chapelle, chapelle cure, cure auxiliaire, chapelle succursale, elle était à la présentation du commandeur de Quittay (Saint-Georges-Buttavent) et non de Saint-Jouin-de-Marnes comme l’affirme Le Paige. La date de sa fondation reste inconnue, mais la structure des parties les plus anciennes en fait un édifice roman. La nef parait d’origine à l’exception du porche d’entrée, bricolé par les soins du curé à la fin du 19e siècle. Le même curé a fait disparaitre les enfeus ainsi que la clé du porche qui portaient un chronographe. L’abbé Angot y a lu 1531. Dans l’histoire ancienne de la Templerie d’Echerbay, Georges Sauvé en fait une autre lecture qui donne 1237, plus conforme à l’architecture originale. Jusqu’en 1870, un enclos paroissial entourait l’édifice.
Le clocher a été remonté en 1735. Il abrite une cloche classée M. H., refondue par Dubois en 1763.
La statuaire, abondante, comprend surtout des statues saint-sulpiciennes en plâtre. La statue en bois polychrome du 15e siècle représentant St Christophe a été placée dans l’église de Saint-Hilaire-du-Maine. Il y avait encore, il y a quelques années, une piétà en terre cuite, cassée mais réparable !!! La statue d’un évêque se tenant la joue ou l’oreille demande à être identifiée. Un intéressant monument aux morts en plâtre peint, production en série des ateliers Leblanc à Angers, fait l’appel des morts de la Grande Guerre de cette petite communauté.
Cet édifice demanderait une étude approfondie de son bâti afin d’essayer de répondre à de nombreuses questions.
Église de Saint-Hilaire-du-Maine.
L’ancienne église de Saint-Hilaire-des-Landes est mentionnée au 12e siècle dans le cartulaire de Savigny. Angot relève son « très mauvais état » en 1802. Il y a six saint Hilaire à se partager les pages des dictionnaires hagiographiques. Une certaine proximité géographique et un culte assez fréquent en Bretagne proche nous fait retenir l’évêque de Poitiers et docteur de l’Église (315-367).
En 1850, l’architecte Renous dresse les plans de la nouvelle église « en style du XIIIe s. à trois nefs, élégante et plus légère que solide » écrit également Angot. Reconstruite sur le même emplacement, l’église néo-gothique a subi une rotation d’un quart de tour : axe N-E/S-O. Aujourd’hui, ce qui surprend le plus extérieurement ce sont les encadrements blancs des fenêtres en arc brisé et de la porte principale ainsi que le vide du tympan de cette dernière. Les murs intérieurs sont décorés d’un faux appareil. Le chœur est décoré de niches aveugles et peint.
Dans le transept N-O, et sous la table d’autel, une châsse abrite l’effigie funéraire de sainte Gaudentia, vierge et martyre à Rome. La céroplastie est une technique de représentation des corps saints. Sur une cage de fil de fer, un mannequin est réalisé en carton avec la tête, les mains et les pieds en cire. Les reliques sont présentées dans une de ces dernières parties ou enfermées dans le corps. La technique est très ancienne mais ces représentations ont connu un regain d’intérêt à la fin du 18e siècle sous le pontificat de Clément XIV.
L’église abrite maintenant une statue en bois, polychrome, représentant saint Christophe. Cette statue datée du 16e siècle provient de la chapelle de la Templerie.
Église de Juvigné.
L’ancienne église était le long de la route de la Croixille à l’emplacement de quelques maisons bordant l’actuelle place de l’église. Malgré des travaux effectués au 18e siècle (clocher sur piliers remplacé en 1738 par une tour), elle est qualifiée de « très grande et assez pauvre » par Davelu. La plus ancienne fondation connue est celle d’une chapelle en 1584. En 1802, elle était en mauvais état, « ayant été occupée alternativement par des personnes de guerres ». Dernière réfection de la toiture en 1858. Les murs sont dégradés et l’église est devenue trop petite devant l’augmentation de la population. Lors de la démolition, découverte par les ouvriers d’un vase contenant « 149 pièces d’or remontant au règne de St Louis » (règne 1226-1270).
L’église, dédiée à saint Martin, est reconstruite entre 1864 et 1870 par l’architecte départemental Pierre-Aimé Renous (consécration le 18 mai 1868). Ce dernier compte, parmi ses réalisations, des édifices civils tels que l’aile sud du palais de justice de Laval, les annexes du lycée et le théâtre de Laval, la Roche Gandon de Mayenne. Le cœur de son activité reste les églises paroissiales, dont Changé, Sacé, La Baconnière, Gennes-sur-Glaize, Montsûrs, Saint-Céneré, Saint-Germain-de-Coulamer, Saint-Ouen-des-Vallons et des presbytères dont celui de Saint-Jean-sur-Erve.
L’église actuelle de Juvigné a été construite dans le style néo-roman, avec une orientation inversée. Son plan est en forme de croix latine avec une grande nef de cinq travées, un transept et un chevet en abside avec deux absidioles. Les voûtes à croisées d’ogive sont en brique et plâtre. La porte orientale est surmontée du clocher en pierre de taille coiffé d’une flèche couverte en ardoise.
L’architecte et les autorités religieuses ne soutiennent pas le projet du curé Charles Fricot de faire agrandir l’édifice : « que ce qu’il y a de mieux à faire c’est de raser toutes les constructions anciennes et d’édifier une église nouvelle d’une étendue proportionnelle à la population » et il mentionne le prévisible refus d’un agrandissement de la part des autorités religieuses, qui tendent alors à favoriser les reconstructions.
Quatre ans de négociations sont nécessaires pour choisir l’emplacement. Elle sera finalement construite dans le Champ de l’Abbé. En décembre 1868, le curé C. Fricot déclare « faire abandon de la portion de terrain nécessaire pour l’emplacement de la nouvelle église (portion à prendre sur ledit champ de l’Abbé). La fabrique « émet le vœu que la vieille église ne sera pas détruite avant que la nouvelle ne soit livrée au culte ». L’emplacement et les matériaux de l’ancienne église sont vendus l’année suivante. Les deux églises ont donc cohabité pendant une année.
1864 : l’architecte diocésain trouve le projet bien conçu, mais il rencontre l’opposition du ministre de la Justice et des Cultes avec des arguments contraires à ceux du préfet. L’avis du ministre l’emporte et l’architecte est tenu de prendre en compte ses remarques sous peine de voir l’aide financière suspendue. En juin est fait le choix des entreprises. Les matériaux commandés sont des pierres de Villaine (Sarthe), de Chauvigny (Vienne), le granite de Saint-Laurent et le tuffeau de Saumousset (49). Les briques proviennent de la Louisière près de Laval.
Très peu d’éléments du mobilier sont conservés : statues en plâtre de la Vierge et de saint Julien, Christ en bois polychrome et tabernacle en bis et plomb.
Le retable du maître-autel conçu par Renous n’existe plus ainsi que la chaire à prêcher en pierre blanche et la table de communion en fonte : Vatican II ? Le chemin de croix en carton-pierre a également disparu. Une cloche de 1829 provenant de l’ancienne église a été refondue en 1904.
L’ouragan de janvier 1884 provoque des dégâts considérables.
En 1910, un procès-verbal du conseil de fabrique relève : Présentement, par suite du mauvais état des gouttières, de l’enduit qui se désagrège et de l’usure du zinc des fenêtres, l’eau pénètre dans les murs, paraît à l’intérieur de l’église et fait tache. Soit par suite de l’infiltration de l’eau ou de l’affaissement du terrain, les murs se lézardent. Le manque de réparations prochaines ne peut qu’aggraver le mauvais état et compromettre la solidité des murs.
En 1920 sont exécutés des réparations de maçonnerie et en 1921 des travaux de charpente et de couverture.
La reconstruction de l’église de Juvigné va entre autres vider les caisses de la municipalité et de la fabrique. Avec un coût de plus de 131 000 F, l’église de Juvigné se place dans la moyenne haute. Les modifications demandées par la fabrique entrainent une plus-value de 19 000 F sans parler du procès entre la fabrique et les entrepreneurs à propos des matériaux.
Parmi les éléments de décor on peut noter :
Une dalle funéraire marquant les sépultures de dame Louise Françoise Guiton des Bois (+1788) épouse de René de la Corbière, dame Renée Louise de la Corbière, veuve de Samuel Picot de Pontaubray, 1803, et demoiselle Angélique Picot, 1804. Nous retrouverons ces noms au château du Feu.
Vitraux :
Assomption de la Vierge encadrée de sainte Mathilde et de saint Louis.
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du Breil de Landal, d’azur au lion d’argent armé et lampassé de gueules.
- Devise : pardonner aux vaincus et vaincre les rebelles.
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de Banville, de vair plein. Devise : Il faut souffrir, Dieu nous aide.
Sainte Marguerite, Fialex, 1875 :
- de Couasnon, d’argent à trois molettes d’éperon de sable, 2 et 1.
- Cardon de Garsignies, d’azur à 3 chardons d’or posés 2 et 1.
N. D. de Pontmain, armoiries de Mgr Dieudonné Le Hardy du Marais, 1876-1886.
Trois lancettes, Fialex 1866 : saint Joseph encadré de saint Grégoire et saint Henri.
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Picot de Pontaubray, d’or au chevron d’azur accompagné de trois falots de gueules, au chef du même.
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Armoiries non identifiées. (voir ci-dessous)
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Le Cornu, d’or, au massacre de cerf de gueules surmonté d’une aigle éployée de sable.
Saint François d’Assise, donateur mentionné.
Saint Edouard, donateurs mentionnés.
Saint Martin
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de la Corbière, d’argent au lion de sable armé, lampassé et couronné de gueules.
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Picot de Pontaubray, d’or au chevron d’azur accompagné de trois falots de gueules, au chef du même.
Saint Pierre
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de la Corbière, d’argent au lion de sable armé, lampassé et couronné de gueules.
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Armoiries non identifiées.(voir ci-dessous)
Saint Jean-Baptiste, don des paroissiens en 1866.
Vitrail aux armes du pape Pie IX et de Mgr Casimir Alexis Joseph Wicart
Le clocher abrite une cloche de 1496 dont la dédicace mentionne le prieur Daligault, dépendant de l’abbaye Saint-Serge d’Angers.
Le château du Feu.
Le château et ses deux ailes en retour est implanté sur une plateforme quadrangulaire entourée de douves en eau. Il a été reconstruit au 18e siècle en remplacement d’un logis plus ancien qui ne devait pas occuper la totalité du site.
Le bâtiment central comporte 5 travées de baies et sa toiture à brisis est éclairée de 4 lucarnes encadrant une 5ème un peu plus grande, centrale, comportant une imposte, réduction de celle de la porte du rez-de-chaussée. Ce corps de logis est encadré de deux pavillons non enduits percés d’une embrasure de tir sur la cour. La clef du linteau de la porte du pavillon sud-ouest porte la date de 1741. De part et d’autre de l’entrée de cour, deux petits pavillons dont celui de droite en entrant, abrite la chapelle. Les dépendances sont venues par la suite relier ces derniers pavillons au logis.
La chapelle a été aménagée dans le pavillon sud-est. Elle abrite essentiellement du mobilier des 17e et 19e siècles. La vasque du bénitier est plus ancienne. Banc coffre daté de 1679. Présence d’une cloche de 1651 avec armoiries de la Corbière.
Légende de N. D. du Feu : Transportée à Juvigné pendant la Révolution, elle serait revenue au Feu. La même légende raconte que deux maçons lui auraient présenté par dérision du mortier et de l’eau : l’un mourut de faim et l’autre de soif.
Nous Pierre des Roches Rouyé( ?) de la
faculté de théologie de Paris prieur
commandataire de Froidfond, curé doyen
d’Ernée à tous ceux quy ces présentes verront salut, savoir
faisons que comme Mathurin Claude de la Corbière
seigneur de La Bénichère auroit depuis peu acquis la terre
et château du Feu situé en la paroisse de Juvigné Montanadais [Sanctus Martinus de Juvineo]
en nostre doyenné ou serait une chapelle en laquelle on avait
desisté depuis quelques années de faire le
service quoy quelle soit fondée et a l’extrémité de la paroisse
il aurait esté conseillé de ne se pourvoir vers monseigneur levesque
du Mans pour de son authorité obtenir sa réabilitation de ladite
chapelle et rétablissement du service…..
En l’assitance duquel nous estant expres transporté de
notre domisille dernée [d’Ernée] jusque audit château distance de deux
lieux avons procédé au présent procès verbal ainsy que sen suit
Entrant par un pont de bois dans la cour du château du Feu
Bien entouré de grands et larges fossés plains de belle eau
et a la droite une chapelle en forme de pavillon a loposé
d’un autre pavillon et quy faict la cimétrie aux extrémités
d’une grande cour dune maison régulièrement batie ; en la
quelle chapelle ayant entré et faict nos prières nous avons
trouvé une table dautel …………..
Guillaume Aubry est mentionné en 1405 comme étant seigneur du Feu. La seigneurie est transmise au gré des mariages jusqu’à Gilles de Chalus en 1632.
La famille de Corbière, possessionnée à Cossé-le-Vivien acquiert la seigneurie de paroisse d’Henri de la Trémoïlle, comte de Laval, en 1629. Mathurin Claude de la Corbière acquiert le Feu en décembre 1698.
Extrait du contrat d’acquest de la terre fief et seigneurie du Feu paroisse de Juvigny ………
Le unzième de décembre (mil six) quatre-vingt-dix-huit après midy par-devant nous René Gilles notaire royal à Chastiaugontier
a esté présent estably et soubsignés messire René d’Helyand seigneur de la Gravelle conseiller du roy premier et ancien présidant en la sénéchaussée et siège prézidial de cette ville y demeurant paroisse de St Remy lequel a volontairement vendu quitté céddé délaissé et transporté, promis et s’est obligé garantir des charges d’hipotèques… et de tous troubles et empeschements … faire cesser les causes et jouir pai(siblement ?)…… au temps advenir,à messire Mathurin Claude de la Corbière … seigneur de la Bénichère demeurant au lieu seigneurial de la Bénichère paroisse de Juvigny
Province du Maine à ce présent et acceptant qui a achepté et achepte pour
luy dame Anne Philipes du Verger son espouze ……………
Le château du Haut Rézeul.
Il est anciennement orthographié Raiseux. Olivier II de Feschal, seigneur de Marboué, le vend à Jean de Courtoux en 1451. Gouverneur de Laval, capitaine du Dauphin, il était à la levée du siège d’Orléans en 1429. Une légende locale s’est emparée du fait pour faire loger Jeanne d’Arc au Raiseux. La seigneurie passe successivement aux la Haie (Brisarthe), la Berchair, la Broise. Un seigneur de Raiseux est mentionné au chartrier de Fresnay en 1507. Le logis est qualifié de maison seigneuriale ou de château.
Le bâtiment en deux parties : l’ajout au nord est venu s’appuyer sur la partie sud comme le montrent le chainages d’angle en façade est et le décrochement de la ligne de faîtage). Le petit édifice circulaire à l’angle nord-est ne figure pas sur le plan de 1813.
Le logis était bordé d’une douve sur 3 côtés. Il devait exister une cheminée au pignon sud (corbeaux). À l’angle sud-ouest une tour escalier dessert l’étage et les combles.
Deux pavillons ferment la cour ; ils encadraient la grande allée allant vers l’est et Saint-Hilaire.
La chapelle est en bout des dépendances agricoles au nord de la cour et donc orientée. Il y aurait un chronographe sculpté dans la façade mais caché sous la masse du lierre.
Angot la mentionne « non fondée » avec un dénommé Dulioust comme chapelain en 1763. Elle est pourtant fondée de 100 livres par Anne du Feu en 1720. La même année, son mari, Charles-René de la Broise, augmente de 20 livres la rente pour 4 messes par semaine. La famille de la Broise, originaire de Normandie, avait des alliances à Lanfrières de Montjean et à Soulgé. On retrouve un Claude de la Broise qui rachète le Raiseux en 1803.
Une cloche, sans aucune marque, est déposée dans le logis : la tradition locale veut qu’elle ait été enterrée pendant la Révolution et retrouvée dans un champ il y a quelques décennies.
Trois statuettes en bois en très mauvais état, pourraient représenter saint Étienne, sainte Marguerite et Marie-Madeleine.
À l’époque de la Révolution, le sieur de Raiseux et son frère furent désignés comme suspects et emprisonnés. De sa prison, l’un des deux frères avait adressé à la commission révolutionnaire un paquet cacheté « d’un cachet présentant des signes de féodalité » ; on se hâta de le lui enlever. Perclus et goutteux, il fut enfin relâché, tout en restant soumis à une étroite surveillance, au mois de mars 1795.